Les usages de l’eau, quelles conséquences ?
Outre les contraintes naturellement présentes, les ressources sont soumises à des pressions et des sollicitations anthropiques, variables selon l’occupation du territoire et les activités humaines présentes, et exacerbées par les impacts du changement climatique, notamment par l’augmentation des températures et la grande variabilité des précipitations.
La fragmentation des cours d’eau
La fragmentation des cours d’eau par les obstacles artificiels fait partie des principales causes d’érosion de biodiversité, un obstacle ne permettant pas la libre circulation des espèces biologiques.
La fragmentation des cours d’eau renvoie à l’idée de perturbation de la continuité écologique de ces cours d’eau, par l’installation d’obstacles à l’écoulement. Un obstacle à l’écoulement est un ouvrage qui :
– ne permet pas la libre circulation des espèces biologiques ;
– empêche le bon déroulement du transport naturel des sédiments ;
– interrompt les connexions latérales avec les réservoirs biologiques ;
– affecte l’hydrologie des réservoirs biologiques.
(source : article R.214-109 du code de l’environnement)
Les dernières données disponibles dans le Référentiel des Obstacles à l’Ecoulement (2017) fait état de 16 128 obstacles à l’écoulement répertoriés en Nouvelle-Aquitaine :
–> 52 % sont des seuils en rivières
–> 25,5 % sont des barrages
–> 18 % sont des obstacles induits par des ponts
–> 3 % ont une typologie non renseignée (indéterminée)
–> les 1,5 % restants sont répartis entre les autres obstacles (digues, épis en rivière, grilles de pisciculture)
La densité d’obstacles à l’écoulement en Nouvelle-Aquitaine est de 21 obstacles pour 100 km soit environ 1 obstacle tous les 5 km. Les bassins qui ont la plus forte densité d’obstacles en rivière sont la Boutonne, la Sèvres-Niortaise amont, le Clain et la Charente amont. La Bidasoa, le Rio Irati, les côtiers de l’embouchure de la Charente à l’embouchure de la Leyre présentent les densités les plus faibles.
Les variations du régime hydrologique des cours d’eau
L’hydrologie est fortement altérée par les prélèvements significatifs réalisés dans les cours d’eau. Le changement climatique participe à ce constat, en provoquant des étiages plus sévères en intensité et en durée, et une baisse des moyennes annuelles des débits de la quasi-totalité des cours d’eau. Une diminution de la disponibilité des eaux de surface est ainsi prévisible dans les prochaines décennies, accompagnée de transformations des cycles hydrologiques.
D’après le réseau ONDE (Observatoire National des Etiages) qui vise à la fois à constituer un réseau de connaissance stable sur les étiages estivaux des cours d’eau (suivi usuel), mais se veut également être un outil d’aide lors de gestion de crise (suivi de crise), 60% des stations d’observation au moins une fois sans écoulement entre 2012 et 2019.
Prélèvements en eau et changement climatique peuvent aussi avoir un impact sur les crues et les inondations.
La crue correspond à la montée des eaux d’un cours d’eau, elle est due à des précipitations en forte quantité, auxquelles peut s’ajouter un sol imperméable ou devenu imperméable suite à une sécheresse importante : le sol n’absorbe plus la quantité d’eau qui lui parvient. Les crues sont des phénomènes naturels faisant parties intégrantes du régime naturel des cours d’eau. Elles constituent le véritable moteur de la dynamique fluviale et sont indispensables à la « vie » d’un fleuve, qu’elles façonnent (érosion, déplacement de matériaux). Elles ont un rôle régulateur : lors d’une crue, les eaux « s’étalent » dans la plaine alluviale, ralentissant ainsi le débit des cours d’eau, et peuvent par la suite contribuer à la recharge des nappes alluviales en s’infiltrant. Elles ont également un rôle épurateur et sont très importantes pour le fonctionnement des écosystèmes aquatiques.
L’inondation correspond au phénomène qui en résulte, l’eau débordant, se répandant sur les terrains alentours. Le changement climatique pourrait modifier le régime des précipitations sur la planète. En France, il pourrait pleuvoir plus l’hiver, et moins l’été. Ainsi, les inondations pourraient avoir lieu de manière plus fréquente. Les phénomènes extrêmes (orages, crues, …) seraient également en augmentation.
La région Nouvelle-Aquitaine compte 2690 communes (source: GASPAR) concernées par le phénomène d’inondation (débordement de cours d’eau et submersion marine) soit près d’une commune sur deux.
A noter que des Territoires à risque important d’inondation (TRI) sont définis à l’échelle de chaque bassin. Il s’agit d’une zone où les enjeux potentiellement exposés aux inondations sont les plus importants (comparés à la situation du district hydrographique), ce qui justifie une action volontariste et à court terme de la part de l’État et des parties prenantes concernées devant aboutir à la mise en place obligatoire de stratégies locales de gestion des risques d’inondation. En Nouvelle-Aquitaine, ils sont au nombre de 16 dont 13 côté Adour-Garonne et 3 sur le bassin Loire-Bretagne.
Les rejets
Les rejets de polluants (nitrates et pesticides principalement), mais également des substances chimiques aux effets potentiels peu connus sur les milieux aquatiques et la santé humaine. L’altération d’un des paramètres du milieu peut provoquer une perturbation générale de tout l’équilibre naturel. La pollution de l’eau est un des principaux facteurs de dégradation.
Quels que soient les rejets, plus que leur nature, c’est l’état du milieu du moment qui influencera la qualité de l’eau (un rejet polluant, même de faible quantité dans une rivière à faible débit, aura plus de conséquences que ce même rejet dans une rivière en période de hautes eaux). Le degré d’eutrophisation d’une rivière augmente aussi la sensibilité de la rivière face à une pollution.
Outre ces impacts, le prix de l’eau ainsi que la fermeture des captages d’eau potable peuvent être des conséquences d’une dégradation de la qualité des eaux prélevés. Le prix de l’eau sera par exemple susceptible d’augmenter si la mise en œuvre de traitements de l’eau de plus en plus sophistiqués (dénitrification, traitement des micropolluants, …) est nécessaire.
Les conséquences sur les milieux aquatiques et la biodiversité
De par les multiples interventions de l’Homme sur les cours d’eau d’une manière générale, ou par les prélèvements dans les différentes ressources en eau pour satisfaire ses usages, les espèces floristiques et faunistiques inféodées aux milieux aquatiques subissent de nombreuses pressions conduisant à leur régression.
Des prélèvements non adaptés, effectués au sein des populations ou concernant les éléments physiques du milieu, comme le sol ou l’eau, peuvent briser l’équilibre naturel des écosystèmes. Par exemple, les espèces aquatiques dépendent de la qualité du milieu mais aussi de la quantité de la ressource en eau. L’augmentation des assecs, principalement due à l’augmentation des prélèvements d’eau met ainsi en péril l’ensemble de la vie aquatique et augmente plus particulièrement la mortalité piscicole, voire la disparition de populations locales d’espèces.
Lorsque les prélèvements sont supérieurs aux capacités de renouvellement du milieu ou des espèces, on parle de surexploitation. Les prélèvements excessifs perturbent les écosystèmes et peuvent causer le déclin de l’espèce prélevée et des espèces qui y sont liées (prédateurs, parasites, pollinisateurs, etc.), et la prolifération d’autres espèces (proies, compétiteurs, envahissantes, etc.).
Les impacts sont tout aussi nombreux sur le littoral notamment pour la conchyliculture qui se caractérise comme étant le dernier utilisateur des eaux continentales sur un bassin versant. Elle profite certes directement d’un effet fertilisant, mais elle dépend des précédents utilisateurs de l’eau, notamment en ce qui concerne sa qualité. Elle peut ainsi être altérée bactériologiquement par l’agriculture et notamment l’élevage, certains nutriments, tels l’azote et le phosphore, semblant favoriser la prolifération de microalgues toxiques, et par des difficultés de traitement des eaux usées. Or, un coquillage qui vit dans une eau souillée, présente à son tour une contamination.
La fragilisation de la biodiversité et des écosystèmes marins ne doit pas être oubliée : pollutions (maritime ou terrestre) et exploitation mal régulée des ressources de la mer (pêche, aquaculture), sont autant de pressions d’origine anthropique qui pèsent sur la biodiversité marine. Les pollutions chroniques, ainsi que des changements importants des apports des bassins versants modifient les populations végétales et, par conséquent, entraînent des modifications des écosystèmes locaux. Ces pollutions sont des pressions peu visibles mais permanentes et fortement nocives pour la biodiversité, jusqu’aux niveaux trophiques les plus élevés (poissons, mammifères, oiseaux).